Le Zodiaque dans la numismatique moghole
A l’origine - En 1584, l’empereur moghol Akbar (1556-1605), au
fait de sa grandeur, est d’un tempérament très ouvert sur les autres cultures et d’un naturel curieux et épris de recherches mystiques et philosophiques. Il s’éloigne petit à petit de l’islam
sunnite. Il finit par créer un nouveau courant religieux le « Din il ilahi » et instaure dans la foulée un nouveau calendrier, abandonnant la datation par l’hégire (départ de Mahomet de la Mecque
pour Médine), non plus basé sur l’année lunaire (354 jours) mais sur la marche et la mécanique du soleil. Cette nouvelle ère est dite « ilahi ». Il attache une attention toute particulière à
l’esthétique et à la calligraphie de son monnayage en y incorporant des décors floraux. Les écrits nous rapportent, bien qu’aucun exemplaire ne nous soit parvenu, qu’il fit frapper des monnaies
en or à son effigie !
Jahanjir - Son fils et successeur Jahangir « possesseur du monde
» le quatrième empereur moghol, dispose également d’une forte personnalité. Ce buveur invétéré, grand amateur de paradis artificiels (opium) est toutefois un esthète très sensible à la beauté et
doté d’un sens artistique éclectique et très libre envers les différentes cultures et religions présentes (des hindous, des sikhs, des chrétiens, des juifs sont présents à sa cour).
Médaille d’or - Ø 23mm – 10,86g
Il maintient le calendrier instauré par son père et fait frapper, en l’honneur de celui-ci, des monnaies/médailles d’hommage
(nazarana) en or à l’effigie d’Akbar au droit et de l’astre solaire au revers ! Ces pièces « nazarana » ne sont pas destinées à une circulation courante, mais sont remises lors d’évènements
exceptionnels et festifs. (n’oublions pas que la représentation humaine ou animale est une violation aux préceptes musulmans).
Mohur - Ø 22mm - 11,95g
Mais le succès de ces médailles, pousse Jahangir à poursuivre son idée et cette fois ci ce sont de véritables monnaies
d’or qui sont émises, des mohurs qui vont encore représenter au droit le buste de son père Akbar, tenant un livre, une fleur ou un gobelet (de vin !) et au revers y faire figurer le signe
zodiacal du mois de frappe.
Mohur - Ø 22mm – 11,88g
Un autre type de mohur, de l’année 6 du règne de Jahangir (1611), où cette fois c’est lui qui semble représenté (aucune
indication de l’atelier de frappe).
Mohur au Belier - Ø 22mm - 11,80g
Principalement réalisé à l’atelier d’Agra, le type se transforme peu à peu pour ne plus représenter que les signes du zodiaque
au droit et une formule standard « cette pièce d’or a été frappée à Agra par Jahangir Shah, fils de Akbar Shah » accompagnée de la date.
Roupie d'argent au Bélier - Ø 22mm - 11,25g
A ce même type, des roupies d’argent feront également leur apparition, issues cette fois des divers grands ateliers de l’empire
(Delhi, Lahore, Ahmadabad et Agra).
A partir de Shah Djahan (1628-1658), fils de Jahangir et cinquième grand empereur moghol, le monnayage perd toutes ces
particularités éloignées des canons musulmans pour reprendre un style plus orthodoxe à l’islam, la « kalima » est à nouveau inscrite (la ilah illa Allah wahdahu la
sherik lahu – Il n’est de Dieu que Dieu, il n’a pas d’égal), et malgré l’immense succès de ce monnayage (échangé alors jusqu’à vingt fois sa valeur officielle), de grands efforts seront
réalisés pour refondre et faire disparaître un maximum de ces prestigieuses espèces « impies », au nom du retour à la loi islamique.
C’est la raison pour laquelle il est si difficile de trouver aujourd’hui ces mohurs d’or et ces roupies d’argent (d’où la
multitude de nombreux faux et refrappes). Seuls trois musées au monde possèdent la série complète en or des douze signes du zodiaque (Cabinet de Médailles de Paris, British Museum, Berlin
Museum).